l’impertinence de l’espoir

toutes et tous nous le savons
la vie ondoie comme une vipère
et la morsure du temps nous mène
à coup sûr à une mort sereine ou violente

alors n’oublions pas le souffle du bourreau
quand il était enfant
la paille entre ses dents
les bulles de savon
comme ses rêves qui s’envolent
au-delà même de ses plus folles aspirations

un au-delà que certains vouent à dieu
au maître ou docteur ou mentor
au capitaine ou sergent-major
au druide ou pasteur ou vicaire
un au-delà que d’autres voient comme un néant
une ineptie un boniment un grand bazar
à cacher dans des boites à chaussures
ou inhumer dans des trous de mémoire

qui a tort
qui a raison
peu importe dans le fond
que tu sois quidam ou bourreau
croyant athée ou inconscient
sache qu’à l’heure de ton ultime départ
tu croiseras encore
dans les méandres de tes convictions
l’impertinence de l’espoir

Spectre insolent de Notre-Dame

Né des cendres de Paris

Je n’en pouvais plus d’être enfermé dans ce tableau, lui-même perdu dans les méandres d’une zone de stockage obscure et froide. J’y figurais avec d’autres démons, gargouilles et farfadets, tout près de la signature du peintre, à peine visible à l’œil nu.

Puis vint le jour de la libération : des flammes partout, mais pas celles de l’enfer, non, celles de la fin de mon calvaire : deux jours de feu intense pour ressusciter, comme d’autres sur leurs croix.

Ma toile et mon cadre consumés, je suis devenu l’ombre de l’ombre d’un spectre fluorescent. Chaque nuit, je prie Saint-Quasimodo et me cache le jour au fond d’un sépulcre dont j’ai seul l’accès.

J’ai hâte de vivre la réouverture au public de ma cathédrale, pour transmettre discrètement aux touristes des répliques du bâtiment que je sculpte dans le charbon des poutres calcinées. Lors de mes balades nocturnes, je les poserai çà et là dans les recoins de l’édifice, entre les bougies sur les porte-cierges, au pied des brûloirs à veilleuses, en souvenir de ma libération.

Témoignages de bagatelle, ce sera là mon unique enfantillage pour les vivants, moi qui suis maintenant hors d’âge et hors du temps.

Vivement le printemps

emmitouflée sur le balcon
silencieuse assise
les pieds dans le vide
elle ausculte le ciel
ses nuages
la vapeur de sa respiration
et se laisse aller à rêver

de vols d’hirondelles
de papillons
d’abeilles et de grêlons
de douceurs olfactives
de corolles
d’effleurements

de bannir l’hiver
des quatre saisons

La fille et l’oiseau

quelles illusions
quels espoirs
quelle quête cherche-t-elle
à définir ou atteindre
quel feu veut-elle éteindre
quelle flamme veut-elle suivre
quels envols veut-elle vivre
qui est-elle face à ses rêves
et dans ses rêves
qui veut-elle devenir